
On prend les mêmes et on recommence. Les yeux légèrement exorbités de Thomas Borer refont surface dans le bouillon du secret bancaire. Borer? Mais oui: Batman sur Paradeplatz, le héros qui dirigea la "task force" nommée début 1997 pour aider les banques suisses (déjà) à se sortir de la pétaudière où leur arrogance les avait jetées à propos des fonds juifs en deshérence.
Il piaffe d'impatience, Borer. Décrétez la Patrie en danger, il accourt. Ambassadeur à Berlin, c'était bien aussi, mais tout a une fin. Quant à son emploi actuel, factotum pour le milliardaire russe Viktor Vekselberg, il est sans doute bien payé mais peu gratifiant socialement. Pensez donc: justifier devant un parterre de plumitifs locaux dans un salon du Baur Au Lac pourquoi son très riche patron, en pleine activité et force de l'âge, bénéficie d'un forfait fiscal à Zurich, ce n'est pas très reluisant.
D'ailleurs les Zurichois ont aboli les forfaits fiscaux et, qui sait, Thomas-Le-Valeureux est peut-être à la recherche d'un nouveau job. Le scénario actuel a tout pour lui plaire.
La NZZ a d'ailleurs publié un intéressant parallèle entre la (non-)réaction initiale de la Suisse officielle face à l'affaire des fonds juifs et sa totale impréparation quand le fisc américain a mis le pistolet sur la tempe d'UBS, et indirectement sur le secret bancaire.
Dans les deux cas, une faute suisse est à l'origine du problème.
Dans les deux cas, l'attaque vient d'une administration américaine démocrate.
Dans les deux cas, elle est totalement prévisible, annoncée par quelques esprits lucides.
Dans les deux cas, les banques et leur association entassent des sacs de sable pour qu'aucun débat intérieur n'ait lieu. Donc, rien n'est préparé.
Dans les deux cas, la Suisse proteste comme une belette prise dans une lessiveuse et finit par céder.
Dans les deux cas, le secret bancaire est levé: pour les morts, s'agissant des fonds juifs en deshérence; pour les vivants dans l'affaire UBS.
Dans les deux cas, les autorités essaient de masquer leur capitulation en jetant du sable aux yeux du bon peuple: "Ce n'est pas grave, il ne s'est rien passé, circulez, y'a rien à voir..."
Afin de compléter la ressemblance, il ne reste plus qu'à constituer une "task force" comme en 1997 - une façon élégante de masquer l'absence de stratégie du gouvernement: depuis le temps qu'il se la laisse dicter par les banques, il ne sait plus comment on fait! Alors pourquoi pas Thomas Borer à la rescousse?
Il ne reste plus qu'à trouver le char-vedette de ce carnaval. En 97, ce fut l'idée boy-scoute d'une fondation de solidarité (soufflée par la BNS). Un milliard pour les nécessiteux de Suisse et du globe (dont les juifs, mais c'était par pur hasard). Voyons, qu'imaginer cette fois??? Ah, mais au fait, on la tient déjà l'idée de génie, la bonne oeuvre, et c'est de nouveau la BNS qui l'a soufflée: une fondation de solidarité à six milliards pour les nécessiteux d'UBS.

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